Eitan LEVY

Je m’appelle Eitan Levy. J’ai 52 ans. Je suis né et j’ai grandi en Israël. Je vis à Bat Yam, au sud de Tel Aviv, dans un petit appartement rempli de rires, de photos, et de mes deux chiens, que j’aime comme mes enfants. Je suis chauffeur de taxi. Mon métier, c’est d’écouter, de parler, d’aider les gens à rentrer chez eux. J’aime la route, la mer, et ces instants simples où la vie se déroule sans drame.

Je suis surtout père. Mon fils Shachar est tout pour moi. Nous faisons des promenades avec les chiens, nous sortons chaque week end pour de longs repas, des barbecues, de la musique forte et de la viande grillée. Il dit souvent que je suis « un père poule, doux et généreux ». Je suis connu à Bat Yam pour mon humour, mes mots gentils, mon goût pour la cuisine et les plaisanteries. Je vis seul, mais entouré d’amis et de voisins qui savent qu’ils peuvent compter sur moi.

Le 7 octobre 2023, je pars travailler tôt. Un passager me demande de le conduire jusqu’au kibboutz Be’eri, dans le sud du pays. C’est loin, mais je dis oui, comme toujours. J’appelle mon fils en route : tout va bien, je roule. Peu après, je le rappelle, paniqué : « Un drone est tombé sur le taxi ! Il y a des tirs ! » Ce sont mes derniers mots. Je suis pris dans l’attaque. Mon taxi est criblé d’impacts. Des hommes armés m’encerclent. Je suis tué sur place. Mon corps est emporté vers Gaza.

Pendant des semaines, ma famille n’a pas de nouvelles. Mon fils, Shachar, cherche partout. Il espère. Mais le 8 décembre 2023, l’armée confirme ce qu’il redoutait : je suis mort le 7 octobre, et mon corps est toujours détenu à Gaza. Une vidéo circule ensuite sur les réseaux : des civils à Gaza transportent mon corps, le piétinent, le maltraitent. Mon fils la voit. Il dit que c’est une image qu’aucun enfant ne devrait jamais avoir à porter.

À Bat Yam, on parle de moi comme d’un homme au grand cœur, toujours prêt à aider, à plaisanter, à sourire. Les chauffeurs de taxi accrochent un ruban noir à leur antenne. Ma photo est affichée dans la gare de taxis où je travaillais. Je laisse derrière moi Shachar, mes chiens, ma ville, et ce goût de bienveillance qui guidait ma vie.

Nous sommes encore 48 otages en captivité à Gaza, dont à priori 20 encore vivants.

 

  • Lieu d’enlèvement : Bee’ri
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